La potence pour un Sicilien à Chicoutimi
Nous sommes le vendredi 11 janvier 1929, dans la cour de la prison de Chicoutimi. Une pendaison est sur le point de se dérouler sous la supervision du shérif Elzéar Boivin. Habitant à Montréal, l’exécuteur des hautes œuvres pour toute la province, Arthur Ellis, est présent. Tous se préparent pour l’application de la condamnation à mort qui a été prononcée contre Gaetano Pepitone, un immigrant sicilien. Revenons tout d’abord sur la chronologie des évènements qui ont mené cet Italien à la potence.

Gaetano Pepitone s’établit à Kénogami vers 1923. Il est attiré, comme bien des immigrants, par les chantiers de construction de barrages hydroélectriques. Né vers 1888 à Palerme en Sicile, il vient s’installer au Saguenay, une région où l’on est peu regardant sur les origines et les antécédents judiciaires des ouvriers. Pepitone dit être marié et avoir trois enfants. Rapidement, il se met à tenir un commerce clandestin dans la maison qu’il a louée sur la rue Laval, dans la paroisse Sainte-Famille. À cette époque, certaines municipalités appliquent alors la prohibition d’alcool.


C’est dans la nuit du 27 au 28 août 1927 que Gaetano rencontre son destin. Cette nuit-là, environ une quinzaine de clients se trouvent dans son établissement. C’est alors que John McNally, un ouvrier d’origine irlandaise, vient boire avec un ami. McNally a été engagé par l’Alcoa Power Company et il est journalier à la Chute-à-Caron depuis deux ou trois semaines. Déjà en état d’ébriété, McNally se fait tout de même servir de la bière par Pepitone. Après quelques consommations, McNally casse un verre que Pepitone lui demande de payer immédiatement. L’Irlandais refuse en arguant qu’il n’a plus d’argent. Son erreur est alors de donner un violent coup de poing dans la figure de Pepitone, ce qui blesse ce dernier au visage à la base du nez et le fait tomber.
Gaetano riposte immédiatement. Il sort un revolver de sa poche, crie à tout le monde de sortir et tire un coup de feu qui atteint McNally à l’estomac et lui cause une blessure superficielle aux muscles. En sortant de la maison avec l’aide de son ami, l’Irlandais reçoit un deuxième coup de feu. La balle l’atteint à la mâchoire, mais le coup n’est pas mortel. Pepitone tire alors pour la troisième fois et ce coup transperce le cœur, un poumon et le foie, causant la mort instantanément. Pepitone s’enfuit. Il est appréhendé le lendemain par le chef de police Henri Boulianne.



Le Sicilien a un procès médiatisé, au terme duquel un jury le condamne à la pendaison. La communauté italienne de Montréal tente alors de faire commuer sa peine, mais sans succès. Gaetano Pepitone demeure la seule personne à avoir été exécutée dans la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean.


Myriam Gilbert, archiviste-coordonnatrice – BAnQ Saguenay
Source : Gervais Tremblay, « La justice en ses œuvres : la peine de mort pour Gaetano Pepitone », revue Saguenayensia, juillet-septembre 2001, p. 9-12.
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